J’ai piqué le titre à Nanouk parce que je le trouve d’une poésie farouche, comme si les parterres de fleurs témoignaient de tous ces mots retenus au bord des lèvres, retenus au fond du coeur, les mots qu’on aurait voulu dire, les mots répétés tant et plus dans nos têtes qu’ils n’ont plus de son. Les poèmes sont souvent les gardiens de ces mots parcimonieux, qui ont muri au fond de soi et qu’il est impossible de garder au dedans plus longtemps. Quand le fruit est mûr, il se partage.
Si on ne gaspillait pas tant de mots, pour sûr que les villes seraient plus fleuries. Savoir ralentir, s’arrêter et parfois se taire. Toucher d’un geste habité dit infiniment plus que les mots. Un regard plein de flammèches, pareil.
Les mots qu’on n’ a pas dit parfois trouent le coeur quand nulle occasion ne nous est plus donnée de les prononcer, de déposer cette guirlande de sons autour du cou de la personne disparue. Les mots qu’on n’a pas prononcés donnent un sentiment d’inachevé.
Mais dans cette traduction libre, je ne sais plus, si c’est d’un proverbe ou d’un vers japonais- Iwanu ga hana – ce ne sont pas les mots qui sont importants, c’est ce qui n’est pas dit. C’est le vide qui fait la valeur de la calebasse autant que son écorce. C’est notre ignorance qui nous permet d’apprendre. Les non dits que l’on choisit sont des fleurs splendides, pour sûr.